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Auteur/autrice : admin8922

Feuilletez Dernière nuit à Ouessant

Feuilletez Dernière nuit à Ouessant

     Voici le premier chapitre de ce roman :

– Bordel, c’est de pire en pire ce soir !

En une phrase pour le moins lapidaire, Loïc avait résumé l’ensemble de mes pensées.

Pour confirmer son ressenti, je lui tendis une feuille reçue le matin même par mail :

– Oui, et tu vois, ce n’est pas près de s’améliorer. Les dernières prévisions météorologiques que j’ai pu recevoir de Brest nous annoncent un sacré grain pour cette nuit. Cela va souffler dur sur l’île.

– Toute la journée, mon baromètre n’a pas cessé de descendre, précisa Loïc en badinant. Avant de quitter la maison pour te rejoindre à la mairie, il était encore en train de tomber en chute libre. À l’heure où je te parle, il doit être si bas que l’aiguille doit en avoir la nausée.

– Tu n’as pas eu de problème pour traverser le bourg par ce temps ? demandai-je en dévisageant mon interlocuteur, planté dans mon bureau, appuyé sur sa canne.

– Aucun souci ! répondit-il en souriant malicieusement. Tu sais, parfois, c’est un avantage d’avoir trois pattes. On tient mieux debout ! Même sous un vent colérique. Non, le problème, c’est que toutes ces bourrasques ont mis à mal mon brushing. Je dois être tout dépeigné, dit-il en riant. Cela va en foutre un coup à mon sex-appeal naturel.

Loïc Dagorn fit mine de se recoiffer en passant ses doigts fins dans l’épaisseur de sa chevelure moutonnante. Il était étonnant qu’à près de soixante ans, cet homme-là soit toujours affublé d’une toison abondante, bien touffue, bien frisée. Elle était juste un peu grisonnante, mais pas du tout clairsemée. Un vrai miracle capillaire !

Nous n’étions pas nombreux ici à l’appeler Loïc ou Dagorn. Les Ouessantins disaient plutôt docteur ou toubib lorsqu’ils le croisaient. Je ne savais plus exactement depuis combien de temps il tenait le cabinet sur l’île mais cela faisait un sacré bail. Et les habitants n’étaient pas près de le laisser partir tant ils appréciaient sa gentillesse et sa bonhommie. Pourtant au début ce n’était pas gagné. En voyant ce jeune médecin débarquer au Stiff, il y a plus d’une trentaine d’années, personne n’aurait parié un centime sur sa longévité parmi nous. Il n’était pas très grand, pas très épais, pas très bien attifé et encore moins bien peigné. On aurait dit une ébauche de bonhomme, une simple esquisse que l’on crayonne sur un bout de nappe en papier au restaurant lorsque le serveur tarde à venir. Je me souviens qu’à l’époque ma mère racontait que, pour façonner un homme d’un tel gabarit, le Bon Dieu n’avait dû prendre qu’un petit morceau d’argile qu’il avait pétri un moment avant de se lasser. Pour elle, il était certain que le Créateur n’avait pas achevé sa besogne, que ce n’était qu’une ébauche, voire un brouillon. C’est vrai que l’enveloppe était imparfaite mais le contenu était plus abouti. Notre docteur était un homme bon, drôle et intelligent, au regard pétillant de vie et de vivacité. Lorsqu’en 2014, j’avais pris la décision de briguer un nouveau mandat de maire, j’avais été le trouver à son cabinet pour lui proposer de se mettre sur ma liste. Je le voulais comme adjoint. Je savais qu’il avait les compétences pour cela. Il avait accepté, plus par amitié que par une quelconque conviction politique.

Dagorn prit place sur un des vieux fauteuils capitonnés qui enlaidissaient mon bureau. Ils étaient d’une couleur ocre aux rayures mauves, une couleur à donner une indigestion à un caméléon comme se plaisait à dire Sandrine, ma secrétaire. Je n’étais en rien responsable de ce choix esthétique plus que douteux. La faute en revenait à un de mes prédécesseurs qui, à mon sens, devait souffrir d’un sévère daltonisme doublé d’un mauvais goût hors norme. J’aurai volontiers changé tout ce mobilier mais le budget alloué à ma municipalité était si chiche que je ne pouvais acheter de nouveaux fauteuils sous prétexte que les précédents étaient moches. Comme ils étaient encore dans un état correct, je m’étais résigné à les garder. C’est Sandrine, en femme pimpante et coquette, qui en souffrait le plus. Combien de fois en entrant dans mon bureau avait-elle lâché : « Rien qu’en les regardant, je crois que j’ai un décollement de la rétine ! Je ne vais pas tarder à vous coller un procès aux prud’hommes, monsieur Perrec, pour conditions de travail dans un milieu inhospitalier ou pour atteinte au bon goût. »

– Alors pour résumer, Fanch, quelle est la situation ?

Il avait posé cette question en caressant le pommeau de sa canne, un étrange pommeau en étain ciselé représentant un escargot à la coquille bombée. Beaucoup de gens s’interrogeaient sur la présence de ce gastéropode, plutôt disgracieux, sur une canne d’une telle valeur. Loïc avait en fait le goût de l’autodérision et pour lui, cet animal convenait à merveille puisque, comme il l’expliquait souvent, depuis qu’il avait eu cette triple fracture à la rotule durant son enfance au Conquet, il se déplaçait à la vitesse d’un escargot grabataire souffrant d’un souffle au cœur. Il était tellement fier de la comparaison qu’il l’avait ostensiblement matérialisé par cette sculpture singulière. Pour la blague, il aimait exagérer. Il ne se mouvait pas aussi lentement qu’il se plaisait à le dire mais il était vrai que sa démarche claudicante ne lui permettait pas d’atteindre de grandes pointes de vitesse.

– La tempête Carla s’annonce aussi forte que prévu. C’est une belle tempête hivernale qui nous arrive droit dessus. Ouessant est en plein sur sa trajectoire et va se faire secouer comme un prunier un jour de récolte.

– Ce n’est tout de même pas la première tempête que va essuyer l’île !

– Non, bien sûr, mais une aussi violente que celle-ci, ce n’est pas commun. Nous n’atteindrons pas les records des coups de vent de 1987 ni de 1999 mais les météorologistes la prévoient quand même dans le top cinq des tempêtes les plus virulentes de ces quarante dernières années.

– À ce point ?

J’acquiesçai d’un signe de tête, tout en relisant une note.

– Il semblerait que nous soyons dans un secteur de très basses pressions qui, d’habitude, passent dans la zone polaire mais à cause d’un foutu anticyclone qui a pris ses quartiers dans tout le Nord de l’Europe, cette dépression va rester et s’accentuer entre les latitudes 50° et 70°, s’étalant de Terre-Neuve jusqu’aux îles britanniques, avant de progresser vers la Bretagne.

– En clair ?

– En clair, cela signifie que des vents violents venant du nord/nord-ouest vont nous tomber dessus en pleine nuit, des vents estimés à 120 km/h avec des rafales pouvant aller jusqu’à 140km/h. Le tout avec des averses dignes du déluge.

– De quoi arroser l’événement comme il se doit !

– Attend, pour que la fête soit complète, il paraît que la pression va tomber jusqu’à 960 hPA[1]. L’océan va être déchaîné. Voilà qui nous promet des lames tellement hautes qu’elles foutraient le vertige à des alpinistes chevronnés.

– C’est la station de Brest qui t’a promis toutes ces joyeusetés ?

– Oui, j’ai reçu un communiqué à 9h00 et un autre à 13h00. Et pour être sûr, je suis allé au Stiff voir ce que la balise météo indiquait.

– Et alors ?

– Alors les gars m’ont dit qu’ils avaient enregistré à 16h00 des vents à 90 km/h, avec des rafales à 110. J’y suis allé vers 17h00 et la balise venait de rentre l’âme. Une bourrasque a arraché un de leurs appareils de mesure. Tu aurais dû voir Tanguy, il était en pétard. Il gueulait comme une brebis à qui on vient de retirer son petit. Il n’y avait plus de raison que je m’attarde sur place et je suis rentré à la mairie.

– Il y a longtemps que tu es là ?

– Un peu après 17h30, je crois. En tout cas, Sandrine était déjà partie. J’ai aperçu au loin sa Polo quittant le bourg.

– Cela ne m’étonne pas. Nous savons tous les deux que Sandrine est toujours ponctuelle sur ses heures de bureau… du moins celles de fin de journée, souffla-t-il en ricanant. Elle est moins rigoureuse sur celles de début de service.

Je partageais son sourire moqueur. J’avais beaucoup d’affection pour ma secrétaire, une femme incontestablement compétente, néanmoins je ne pouvais nier qu’elle ne se montrait pas toujours très vaillante face à la tâche. Elle perdait beaucoup de temps à papoter et ne risquait pas d’être surprise un jour à faire des heures supplémentaires. Elle quittait toujours le bureau à l’horaire prévu, jamais une minute de plus. Je dois avouer que ce soir, je n’étais pas mécontent de son absence. C’est ce que je confiai à mon ami :

– Tant mieux qu’elles soient parties, elle et ses parlotes. J’avais besoin d’un minimum de calme et de silence pour préparer la réunion de ce soir.

– C’est un Conseil municipal d’urgence que tu nous concoctes ?

– Il y a un peu de cela. Je sais que nous serons impuissants face à Carla mais nous serons au moins présents, histoire de nous permettre de faire le point et de pallier le plus pressant en cas de problème.

 

Le silence se fit peu à peu entre nous. Nous restions à écouter le tumulte du vent à l’extérieur de la mairie. Un sifflement lancinant semblait frôler la façade de la mairie. Le vent s’époumonait à souffler sur le bourg, comme un môme devant son gâteau d’anniversaire qui cherche à éteindre toutes les bougies. Cela soufflait et cela postillonnait sans relâche.

Ce vacarme était entêtant et je dois l’avouer un peu inquiétant.

Dagorn devait également se sentir un peu mal à l’aise puisqu’il préféra le son de notre conversation aux vociférations enragées du vent :

– Tu as remis ton attelle, Fanch ? lança-t-il en pointant mon bras gauche de l’index. C’est ta tendinite qui fait encore des siennes ?

– Oui, elle m’avait foutu la paix pendant longtemps mais aujourd’hui, elle me fait particulièrement souffrir. Ce doit être l’humidité ambiante qui l’a réveillée.

– Elle a bon dos l’humidité. Tu as encore dû forcer sur ton bras.

– Il a bien fallu que je rentre mon canot. Je l’avais laissé sur mon gazon. Je l’ai tiré jusqu’au garage. Et puis, dans mon décret d’hier, j’ai demandé à nos concitoyens de ranger ou d’attacher tout ce qui serait susceptible de s’envoler avec les bourrasques. Il a bien fallu que je montre l’exemple. Mais à force de le solliciter, mon bras gauche s’est mis à me faire mal.

Dagorn me fixa de son regard vif en esquissant un sourire furtif. Il lâcha en faisant un clin d’œil :

– Espérons que demain matin la seule victime à déplorer soit ton bras.

Que pouvais-je ajouter à son bon sens ?

Rien. Je me murai dans un silence contemplatif. J’écoutai le grincement régulier de la charpente de la mairie. La toiture semblait souffrir sous les brusques rafales, faisant entendre de sinistres craquements comme le ferait la mature d’un vieux trois-mâts pris en pleine tourmente.

Je ressentais une forte tension qui était en train de naître et de croître, sans que je sois en mesure de jauger si cette nervosité m’était propre ou si elle flottait dans l’air ambiant engendrée par cette situation climatique extrême.

 

La porte de mon bureau se mit soudain à trembler sous l’effet d’un frappement vigoureux. J’eus à peine le temps de dire « entrez » que Pol Bonnemayre, un de mes conseillers municipaux, fit son apparition.

Bonnemayre était un Ouessantin pur souche, un véritable breton bretonnant comme disent les Rennais avec un soupçon de mépris dans la voix, le même mépris qu’auraient des Parisiens pour des cousins de province. Pourtant Bonnemayre, il fallait mieux le moquer en sourdine, et à distance de préférence, car c’était un colosse, un solide bloc de granit dont nos ancêtres faisaient des menhirs. Il n’était plus de première jeunesse mais toujours solide. Lors de certaines fêtes dans le bourg de Lampaul, des jeux étaient organisés où les Îliens pouvaient s’affronter en toute convivialité. Chaque année, Bonnemayre restait invaincu au tir à la corde. Plus d’un jeune avait fini le cul par terre d’avoir voulu voler son titre à cette force de la nature. Après son service militaire à Lorient, il avait fait une petite carrière dans divers clubs de rugby, au poste de troisième ligne centre, à Clermont ou à Toulouse. À trente ans, il avait abandonné les terrains gazonnés pour devenir chef mécanicien dans la marine marchande. Il avait vogué une bonne quinzaine d’années sur toutes les mers du monde avant de venir s’échouer sur le port de Brest. Il y avait ouvert un modeste bar à marins qui ne lui avait pas permis de faire fortune. Et finalement il était revenu passer sa retraite sur son île natale.

C’était un homme simple et discret. Un vrai taiseux qui ne l’ouvrait que lorsqu’il avait vraiment quelque chose à dire. Une qualité rare à l’époque de la télé réalité ou des réseaux sociaux où plus personne n’a honte d’exposer à la face du monde la platitude de sa vie ou la futilité de ses réflexions.

D’une voix claire et forte, cette statue de granit me mit au courant du premier incident provoqué par Carla :

– J’ai essayé de te joindre sur ton portable tout à l’heure, Fanch, pour te signaler qu’un réverbère était tombé à la sortie du bourg, en direction de la pointe de Pern. Mais cela sonnait occupé. Impossible de t’avoir. J’ai voulu appeler Sandrine à la mairie, mais je n’ai pas eu plus de succès.

– Cela ne m’étonne pas, Pol. En fin d’après-midi, le répartiteur téléphonique s’est mis à déconner. Je ne sais pas quel est le problème, si c’est à cause du vent ou de la pluie mais résultat des courses : il n’y a plus de téléphone sur toute l’île, ni portable, ni fixe. Et il n’y a plus de liaison internet non plus. C’est le black out total. C’est déjà un miracle que la centrale du Doulou soit en état de marche et qu’on ait encore de l’électricité.

– Tu veux dire qu’on ne peut plus communiquer avec le continent ?

– Plus du tout ! Ni mail, ni appel téléphonique. Et avec cette tempête, impossible de quitter l’île. Vu les rafales annoncées, il a été décidé de fermer l’aérodrome. Tous les avions sont cloués au sol jusqu’à nouvel ordre. Quant aux liaisons maritimes avec le Conquet, il ne faut même pas y penser avec une mer d’Iroise démontée comme jamais.

– En clair, notre île est complètement coupée du continent ? demanda Dagorn en fronçant ses sourcils broussailleux.

– Oui, complètement isolée du reste du monde, mon vieux Loïc. Pendant quelques heures, nous allons être livrés à nous-mêmes, en plein cœur d’une terrible tempête.

– Eh bien, cela nous promet de bons moments en perspective…

[1]  Symbole de l’hectopascal, l’unité de mesure de la pression.

Feuilletez Qu’en dira-t-on

Feuilletez Qu’en dira-t-on

Voici le début de ma nouvelle :

Qu’en dira-t-on

— Vous avez demandé le 17, ne quittez pas…
Une voix apparemment âgée, mais plutôt énergique, répondit dans la foulée.
— Je suis bien au commissariat de Boskerque ?
— Oui, madame, mais ne quittez pas, je suis à vous dans une petite seconde.
Un infime bruit de froissement de papier se fit entendre, ainsi qu’un court échange verbal en arrière-fond, avant que la policière ne reprenne la conversation d’un ton chaleureux :
— Excusez-moi, madame, je suis à vous. Que puis-je faire pour vous ?
— Enfin, ce n’est pas trop tôt ! Je suis madame Caron, qui vit au 4 de la rue Rompe-Cul.
— Oui ?
— J’aimerais parler au commissaire.
La demande avait tout d’un ordre tant elle était impérieuse.
— Je suis désolée, mais le monsieur le commissaire n’est pas encore arrivé. Il ne sera là que vers neuf heures ou neuf heures trente. Mais dites-moi ce qu’il se passe, je pourrai peut-être vous aider.
— Non, non, ce n’est pas la peine. Je veux parler à un gradé.
— Je peux vous passer le brigadier Legrain, si vous voulez, il est…
— Non, coupa-t-elle sèchement. Je veux parler au commissaire, et pas à un de ses sous-fifres. Je veux quelqu’un de compétent. Tant pis, je rappellerai ou je passerai tout à l’heure.
Sans même un « au revoir » ou un simple « merci », l’inconnue avait raccroché.
La jeune policière se mit à sourire en repensant aux mots entendus : « commissaire » et « compétent ». Jamais elle n’aurait songé à associer ces deux termes dans une même phrase. Apparemment la dénommée Caron ne devait pas très bien connaître le commissaire Vasseur.
« Plutôt sympathique ; à l’écoute de ses subalternes ; avec un humour souvent caustique ; laid ; sec comme un courlis ; brouillon ; bordélique ; fâché avec les horloges ; d’une intelligence moyenne ; peu intuitif. » Voilà en général ce que disaient les policiers de leur commissaire Quentin Vasseur. Mais « compétent », ça, jamais cela ne leur venait à l’esprit. Il serait exagéré d’affirmer qu’ils ne l’appréciaient pas, mais ils étaient pleinement conscients de ses défauts et surtout de ses limites.
Sa hiérarchie était parvenue depuis longtemps au même constat et c’est la principale raison pour laquelle elle l’avait laissé végéter depuis dix ans dans ce petit commissariat de la commune de Boskerque.

Cette modeste ville des Hauts-de-France ne comptait plus que 15 000 âmes alors qu’elle en avait près du double trente ans plus tôt. Les fermetures de l’usine Peugeot et des Textiles Fournier, les deux principaux employeurs de la ville, avaient provoqué une véritable hémorragie démographique. Les rieurs se plaisaient à dire que les déménagements étaient devenus un sport plus courant que la bourle ou le football, dans le coin. À ce train, Boskerque était devenue ce que les Américains nommaient une shrinking city .
Le taux de chômage atteignait des altitudes qui ne pouvaient que donner le vertige à des habitants habitués aux plaines du Pas-de-Calais. Ce chômage persistant et le manque de perspective pour sa jeunesse servaient de terreau à une petite délinquance que la police peinait à endiguer. Aux dernières élections municipales, Stanislas Krawczyk, le candidat du Rassemblement national, avait fort opportunément fait campagne sur le thème de l’insécurité, exagérant les chiffres des migrants passant quotidiennement par la commune pour rejoindre Calais. Les Boskerquois avaient cru aux sirènes du RN, à ses promesses d’éradiquer le chômage et la délinquance, et avaient élu Krawczyk à une forte majorité.
Quentin Vasseur n’avait pas voté pour ce type, non seulement parce qu’il ne partageait pas ses idées, mais aussi parce qu’en tant que commissaire, il avait été très souvent cité et critiqué dans les discours de l’extrême droite sur son incapacité à arrêter les dealers et autres voleurs de la commune.
Pour lui, ce manque de résultats ne pouvait lui être imputé. Trop d’affaires sur lesquelles enquêter et trop peu d’effectifs à sa disposition. Son bureau croulait littéralement sous les piles de dossiers disposées en arc de cercle autour de lui.
Assis sur son fauteuil, le dos plié à feuilleter une liasse de documents, Vasseur s’arrachait les cheveux en tentant d’élucider une affaire de viol.
Bien entendu, « s’arracher les cheveux » ne pouvait être qu’une simple formule puisqu’il avait le cheveu aussi rare que grisonnant. L’homme avait cinquante-deux ans, il était de taille moyenne et maigre comme un clou. Son visage semblait mal proportionné, comme si un sculpteur amateur l’avait pétri au petit bonheur la chance dans une masse de terre glaise, l’agrémentant d’un disgracieux menton en galoche, d’un nez cassé de boxeur et d’un front dégarni assez bombé.
La bouche en pleine action de mastication de chewing-gum, Vasseur relisait la déposition de la jeune femme violée. Il ne s’en doutait pas encore, mais le commissaire allait bientôt laisser tomber cette enquête. Il allait avoir une nouvelle affaire à étudier, une affaire dont il se souviendrait toute sa vie.

Tout avait commencé par trois coups brefs contre sa porte, trois coups semblables à ceux qui retentissent au théâtre, avant l’ouverture du rideau.

Pour connaître la suite, il ne vous reste qu’à vous rendre dans la librairie la plus proche ou de commander le livre sur le site « Au mot près éditions ».

Présentation du Recueil

Présentation du Recueil

Michaël Herpin et « Au mot près Éditions » ont demandé à dix auteurs d’écrire des nouvelles noires ou policières, avec pour seule contrainte de commencer par ces quelques mots : « Vous avez demandé le 17, ne quittez pas… »

J’ai eu l’idée d’inventer une histoire se déroulant dans une ville du nord (imaginaire), en m’inspirant d’un fait divers survenu dans une commune du Calvados au début des années 2000 où sévissait un mystérieux corbeau. C’est ainsi qu’est née la nouvelle « Qu’en dira-t-on. »

Les épidémies de 1720 et de 2020

Les épidémies de 1720 et de 2020

Dans mon dernier roman « Confesse – le destin d’un prêtre libertin« , mon héros Armand de Penthou se trouve en 1720, au cœur de la ville de Marseille alors que l’épidémie de peste y fait des ravages. Loin de moi l’idée de vouloir mettre sur un même plan les effets de la peste  de 1720 et ceux de la pandémie de Covid-19 en 2020 (les mortalités de ces deux maladies ne sont pas du tout comparables) mais j’ai retrouvé des comportements similaires chez les contemporains de ces deux  maux… et c’est parfois un peu troublant de voir que, malgré trois siècles d’écart, les attitudes changent peu… Je pense que vous ferez le parallèle facilement…

– En 1720, alors que la peste fait ses premières victimes, les édiles de la ville tardent à mettre Marseille et son port en quarantaine, de peur de mettre en danger l’économie locale (mais il faut dire que la plupart des édiles sont aussi des négociants qui vivent du commerce avec le reste des ports méditerranéens), ce qui ne fera qu’aggraver la situation.

– Les riches bourgeois de Marseille fuient la ville dans leurs bastides de l’arrière-pays au risque d’y propager le mal.

– La peur d’attraper la peste pousse certains Marseillais à fuir tous ceux qui avaient pu approcher de près ou de loin des malades : on évite les portefaix ou les corbeaux (la plupart du temps des galériens) qui ont porté des pestiférés, on évite des religieuses qui ont accueilli et nourri des malades, on évite certains prêtres qui ont donné les derniers sacrements à un mourant (même si on avait inventé des pincettes de plus d’un mètre pour donner l’hostie à « distance » ou des baguettes tout aussi longues pour appliquer les saintes huiles sur les fronts).

– La peur pour les agonisants de mourir seuls, loin de leurs proches, et de ne pas avoir droit à un enterrement décent sans cortège funèbre, ni même d’avoir un prêtre pour les bénir (et en plus d’être inhumé dans une fosse commune à l’époque).

– Même si internet n’existait pas encore, les rumeurs pouvaient se propager tout aussi vite, notamment sur des remèdes censés être miraculeux comme le « vinaigre des quatre voleurs. » Faute de médicaments, on utilisait divers moyens pour repousser le mal : « brûler chaque jour une once de soufre dans les maisons, toutes fenêtres closes, en étendant dans la pièce principale les habits portés depuis le début de l’épidémie dans l’espoir de purifier l’air empesté » ou « se frictionner les mains et le visage de vinaigre pour repousser la malignité de l’air ».

– Le pouvoir royal ordonne le blocus du terroir de Marseille pour que la contagion ne gagne pas plus de terrain : « Sa Majesté fait très expresses inhibitions et défenses aux habitants de la ville de sortir hors desdites limites ou barrières et d’en transporter aucune marchandise ni denrée à peine de vie. » L’armée est chargée d’empêcher quiconque de quitter la zone infectée. Mais ce confinement forcée ne plaît pas à tout le monde. Quelques uns tentent de forcer le blocus ou même soudoient les gardes pour qu’ils les laissent passer.

Mais les parallèles s’arrêtent là car  nous ne pouvons comparer par exemple les médecines des deux époques : en 1720, les médecins (aussi inefficaces que ceux décriés au XVIIe siècle par Molière) ne peuvent rien faire alors qu’en 2020, tous les soignants se dévouent pour leurs patients avec des moyens modernes (mais si parfois en nombre insuffisants). En 1720, certains

médecins font pourtant preuve de dévouement même s’ils sont impuissants (au bout des 45 premiers jours d’épidémie, sur 12 médecins agrégés, quatre ont fui la ville et cinq ont succombé : ils n’en restent plus que trois à œuvrer pour leurs patients).

De plus, devant l’hécatombe, l’anarchie règne : il a été signalé que certains gardes se faisaient parfois payer par des Marseillais pour qu’ils laissent les corbeaux entrer dans les maisons pour enlever les cadavres de leurs proches ou même que certains forçats achevaient des mourants pour pouvoir les voler en toute impunité.

Et surtout, la mortalité n’est pas comparable : les premiers cas de peste sont signalés le 9 juillet 1720… le 23 juillet, on parle de 14 morts en une journée ; vers le 2 août, on est à près de 50 morts par jour ; vers le 2 août, on est à près de 100 morts par jour ; vers le 15 août, 300 morts par jour ; vers le 20 août, 500 par jour ; de fin août à mi-septembre, on est à 1000 par jour ; puis le nombre de décès fléchit mais du 30 septembre au 10 octobre, on est encore à 200 par jour…

 

Salon de Cheux : le retour

Salon de Cheux : le retour

Cette année, je reviens au salon du livre de Cheux. C’est toujours un plaisir puisque  les lecteurs y viennent toujours aussi nombreux et c’est aussi là que mon roman Confesse a été primé en 2018… Petit souvenir ci-dessous d’une grande joie :  recevoir le prix Reine Mathilde…

Journal Le Bonhomme libre du 22 novembre 2018

Conférence à la médiathèque de Saint-Aubin

Conférence à la médiathèque de Saint-Aubin

Il semblerait que j’ai pris goût de parler devant un auditoire… Après ma semaine de cours, je ne trouve rien de mieux à faire que de rencontrer des lecteurs, des bibliophiles ou des curieux pour parler de mes livres et répondre à leurs questions. Si vous ne savez pas quoi faire ce dimanche 29 septembre, venez m’écouter à la médiathèque de Saint-Aubin dur Mer à 18h00.

Conférence à Montormel le 24 août 2019

Conférence à Montormel le 24 août 2019

 Voici une photographie de P. Billaux prise en 1965 lors de l’inauguration du mémorial de la fermeture de la poche de Chambois. Le 24 août prochain, je retournerai sur les lieux pour faire une conférence au musée de Montormel à 11h00 pour expliquer le déroulement de la dernière grande bataille en Normandie (en août 1944) et surtout comment elle fut vécue par des milliers de civils piégés dans la zone à cause des aléas de la guerre et des différents mouvements de troupes.

Durant cette journée (où beaucoup de monde est attendu), plusieurs moments sont prévus : –  9h30 à 12h : randonnée de la Paix sur l’ancien champ de bataille. – 11h à 12h : ma conférence dans la salle de projection du musée.  – 12h à 14h : pique-nique géant. – 13h à 15h : dédicace de mon livre « Pris au piège dans la poche de Chambois – Témoignage de civils » et dédicace de J. Wiacek pour son ouvrage « Histoire de la 1ère division blindée polonaise« . – 16h30 : cérémonie commémorative officielle pour rendre hommage au général polonais Maczek.

[Petit souvenir de ma précédente conférence à Montormel en août 2014 : http://gregory-laignel-auteur.fr/conference-au-memorial-de-coudehard-montormel-en-aout-2014/]

Souvenirs du 22 juin

Souvenirs du 22 juin

A la demande du Conseil départemental de l’Orne, je suis allé le 22 juin dernier à Alençon pour expliquer et raconter, à partir de mes recherches, la vie des civils durant l’été 1944, en plein cœur de la bataille de la Poche de Chambois. Plus de 150 personnes étaient présentes pour m’écouter et me poser des questions sur mon livre ou sur les témoignages recueillis. Un très bon moment illustré ici par quelques photographies.

[propriété des photos : CD61-ETE 44-220619©B.Lemarie-StudiosNumériques-CD61].

Conférence du 22 juin à Alençon

Conférence du 22 juin à Alençon

Pour les commémorations du 75e anniversaire, le Conseil départemental de l’Orne m’a demandé de faire une conférence sur la place des civils lors des combats de la Libération. Je serai donc présent à 15h00 le 22 juin à l’Hôtel du département (salle Ecouves) à Alençon pour parler de mon livre sur la poche de Chambois, de mes recherches en général, et sur les lieux de mémoire de cette bataille.